La liste Islam : un parti clérical, antidémocratique, totalitaire

Un communiqué de presse du RAPPEL (Réseau d’Action pour la Promotion d’un Etat Laïque)

La liste Islam : un parti clérical, antidémocratique, totalitaire

Le 3 décembre a vu l’installation des conseils communaux issus du scrutin du 14 octobre 2012. En région bruxelloise, cet événement a innové. Pour la première fois en Belgique siègent deux élus d’un parti islamiste. Et pour la première fois un parti a inscrit à son programme l’instauration de la loi religieuse – en l’occurrence la loi islamique, la charia – comme loi commune. Jadis, le vieux Parti catholique, pourtant inféodé à Rome, n’avait jamais envisagé de fondre le droit canon en droit belge. En promouvant sa loi religieuse comme source de droit pour tous les résidents d’un pays, même pour les fidèles d’une foi autre, même pour les agnostiques et les athées, le parti Islam révèle sa vraie nature : cléricale, antidémocratique, totalitaire.

On pourrait en rester là. Mais il convient d’approfondir. Les médias ont insisté à juste titre sur les sorties rétrogrades et provocatrices des leaders de ce parti : établir la charia, mais « en douceur (…) pour aboutir (…) tout naturellement à un Etat islamique en Belgique » (RTBF – 29.10.2012) car « pour l’instant, il y aurait trop de mains coupées (…) étant donné le nombre de délits » (La Capitale – 16.10.2012), rétablir la peine de mort, exiler les apostats de l’islam, organiser la ségrégation entre hommes et femmes dans les transports en commun, un régime d’impôts et d’allocations familiales différencié pour les musulmans, contraindre les pouvoirs publics à traiter exclusivement avec des banques islamiques,… sans omettre d’autoriser le port du hidjab par les fonctionnaires, en particulier les policières ainsi que les élèves dès l’âge de 12 ans, le port du niqab (voile intégral) en rue, servir des repas halal dans les cantines, etc. Sans oublier l’ostracisme envers les homosexuels, les agnostiques et les athées.

Influence perverse et front islamique

Toutefois l’aspect le plus pervers de la liste Islam est passé inaperçu. Il réside dans son programme social et son projet d’alliances stratégiques. En un document de 23 pages, Islam présente une liste détaillée de revendications sociales, en fait un pillage des programmes des partis démocratiques de centre-gauche comme de centre-droit. Du logement à la fiscalité communale, de l’enseignement à la jeunesse et aux sports, du commerce à la santé, cet écran de fumée dissimule la vraie nature du parti. Il lui confère un visage bonasse, au-delà des clivages partisans habituels. Il pourra abuser un électorat populaire déboussolé par un environnement urbain sinistre, un chômage massif, les humiliations, les ruptures identitaires, l’exclusion sociale et le racisme.

Quant aux alliances stratégiques, la liste Islam ébauche un front islamique bruxellois. Islam a répertorié tous les mandataires selon lui « d’origine musulmane » élus sur les listes démocratiques en Région de Bruxelles-Capitale. Peu importe qu’ils soient pratiquants ou non, agnostiques ou athées, ni surtout qu’ils se considèrent comme les mandataires de tous leurs concitoyens et cantonnent leurs convictions philosophiques à la sphère privée. Parti identitaire clérical, Islam leur assigne une nature musulmane inaliénable. Il relève que, sur 685 conseillers communaux, 141 sont « musulmans », parmi lesquels 27 échevins et un bourgmestre. Il insiste : avec « plus de 20% des élus », « si les 139 élus d’origine musulmane le veulent, avec les 2 élus ISLAM, nous serons la première force politique de la capitale » (www.islam2012.be). Fanfaronnade ? Voire. Des convergences inter partis peuvent se nouer de manière pragmatique, sur des dossiers ponctuels. Par ce biais, des liens d’influence peuvent s’établir, de manière informelle, entre élus et militants. Sans parler des pressions et des campagnes de diffamation visant les réfractaires, comme c’est déjà le cas depuis des années.

Imprégnation des esprits et banalisation en marche

Avec seulement trois candidats masculins présentés sur trois listes dans trois communes bruxelloises (des listes à candidats uniques pour contourner les règles de parité hommes/femmes ?), la liste Islam a cartonné à plus de 5.100 voix et 2 élus. Outre s’implanter dans la capitale, elle affiche ses ambitions en Wallonie, notamment à Liège et à Verviers. Elle pourrait y parvenir. Les réactions immédiates d’édiles locaux (« Un coup d’épée dans l’eau », « Un mouvement marginal », « Du grand n’importe quoi » – La Meuse – 05.11.2012) indiquent une certaine nervosité. Le parti Islam pourrait bien en effet capter des voix populaires. Mais de là à devenir une formation de pouvoir… Trop radical. Trop marqué sur un plan ethnique. Ses chefs savent pertinemment que jamais aucune majorité belge ne se dégagera en faveur de leur « régime islamique. » Le vrai et réel danger que représente Islam réside ailleurs. Il joue un rôle d’incubateur pernicieux. Ses idées vont percoler parmi les populations de tradition musulmane. A la manière dont le Vlaams Blok/Belang a imbibé la Flandre. Et peut-être, plus encore, à la manière dont le Front national de Jean-Marie Le Pen et ses éructations provocatrices (« Durafour crématoire », « Le détail de l’histoire », etc.) ont imprégné l’opinion française. Avec ses coups de gueule sur la charia, son programme populiste, ses ouvertures vers les autres partis et son activisme – il a mené campagne au porte à porte – le parti Islam pourrait induire « l’islamo-fascisation » de certains pans de l’opinion belge.

L’autre effet pervers du parti Islam concerne l’extrême droite historique. Le Vlaams Belang et les partis francophones équivalents possèdent désormais un épouvantail grandeur nature pour doper leur électorat. L’islamo-fascisme se charge de crédibiliser leur rhétorique xénophobe et leur démagogie anti musulmane. Comme quoi, les extrémismes antidémocratiques se renforcent mutuellement.

La banalisation du parti Islam, elle, est déjà en route. Au plus haut niveau. Pour Isabelle Praile, vice-présidente de l’Exécutif des Musulmans de Belgique « la plupart des gens qui ont voté pour ce parti (…) (y) voyaient un espoir de résoudre les nombreuses discriminations dont ils sont victimes, en tant que musulmans (…) une alternative aux partis traditionnels (…) le programme de ce parti soulève des questions d’ordre sociétal, l’approche globale est relativement cohérente. Cela ne me pose donc pas de souci (…) tant que l’on est pas dans un système où le religieux impose son fonctionnement, son agenda au pouvoir politique (…) Le musulman doit défendre le droit des musulmans mais il est hors de question d’imposer l’islam aux autres. A ce titre, j’invite les élus et les cadres de la société civile à interpeller M.Ahrouch et demander des précisions au sujet des propos qu’il a tenu » (DH.be – 09.11.2012). A quand, Madame Praile, un appel au dialogue avec Philip Dewinter, le leader néo-nazi du Vlaams Belang ?

Cordon sanitaire

Ainsi après le Vlaams Blok/Belang, après le Front national, ses avatars et clones multiples, le paysage politique belge voit-il apparaître un nouvel acteur d’extrême droite : la liste/le parti Islam. Comment le neutraliser ? Comment le combattre ? Par la même stratégie que celle déployée jusqu’ici contre les partis liberticides : le cordon sanitaire. Lui couper tout accès aux médias, ne jamais citer ses dirigeants ni leur offrir de tribune. Convaincre ses sympathisants et électeurs de la vanité de leurs suffrages. De ce point de vue, le démarrage présente quelques ratés. Effet d’exotisme sans doute, les médias ont ouvert grand les porte-voix à ses sinistres chefs. Mais il n’est point trop tard pour se ressaisir.

Notre interpellation s’adresse également aux partis démocratiques. Qu’ils cessent d’aligner des candidatures électorales affichant des signes religieux ostentatoires. Ce faisant, ils légitiment la cléricalisation de l’espace public et du champ politique. Ils banalisent un parti comme Islam. Ils favorisent sa stratégie d’influence religieuse globale. A ces revendications s’ajoutent celles, traditionnelles, sur l’interdiction légale des signes religieux dans tout le cursus scolaire obligatoire et pour les fonctionnaires, de la nourriture consacrée dans les cantines publiques, de la charia en droit personnel et familial, etc.

Enfin, dès lors qu’un parti milite pour islamiser la société, le port de foulards islamiques par les autorités d’un bureau de vote équivaut à y distribuer un tract politique. De même dans les assemblées élues. Il convient, comme le R.A.P.P.E.L. l’a déjà revendiqué, de mettre en œuvre des règlements / législations interdisant les signes convictionnels pour les assesseurs et présidents de bureaux de vote, ainsi que pour les membres des assemblées représentatives. A ce propos, à la prestation de serment, en 2009 au Parlement bruxellois, de la première parlementaire voilée d’Europe, les honteux applaudissements claquaient comme une gifle à ses collègues d’origine musulmane qui avaient, elles, la grandeur de considérer leurs convictions religieuses et philosophiques comme ressortissant de la sphère privée.

Philipp Bekaert

Yvan Biefnot

Chemsi Cheref-Khan

Elie Cogan

Gisèle De Meur

Nadia Geerts

Michèle Peyrat

Philippe Schwarzenberger

Fatoumata Sidibe

Jamila Si M’Hammed

Georges Verzin

Willy Wolsztajn

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