Category: Mes cartes blanches

Ce 8 mars, je fais trêve…

Ce vendredi 8 mars, journée internationale des droits des femmes, a lieu la première grève des femmes en Belgique.
Ce 8 mars, elles seront nombreuses dans les rues en solidarité avec toutes les femmes du monde entier. Elles marcheront contre le système patriarcal, pour défendre leurs droits et revendiquer une égalité réelle dans tous les domaines. Elles marcheront pour un monde meilleur car quand les femmes luttent pour défendre leurs droits, c’est toute la société qui en bénéficie.
Elles sont encouragées à faire grève dans tout ce qu’elles ont l’habitude de faire pour montrer que « quand les femmes s’arrêtent, le monde s’arrête ». Cette grève des femmes, est un mouvement d’une ampleur à portée internationale. Une convergence des luttes des femmes d’ici et d’ailleurs. Une nouvelle vague féministe. Car partout dans le monde, les droits des femmes sont menacés de régression. Et la sororité est désormais le seul rempart. L’alliance des femmes sera leur plus grande force.

Ce 8 mars, pour la première fois en près de vingt ans, je fais trêve. Il n’y aura de ma part ni marche, ni slogans, ni banderoles, ni drapeaux, ni casseroles, ni fleurs, ni couronnes. Parce ce que je ne serai pas à Bruxelles. Ce sera un jour de trêve car en réalité, le 8 mars, c’est tous les jours.
Ce 8 mars, je me pose. Je regarde le chemin parcouru. Celui-là, je le connais. Celui à venir je sais qu’il sera une course de relais, qu’il faut passer le flambeau.

D’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours été féministe. Ce n’était pas un choix mais une nécessité vitale. Pour moi, le féminisme est un humanisme. Il s’agit de refuser d’être déterminée par son sexe biologique, de lutter pour que chaque être humain soit égal en dignité, en respect, en droits et en devoirs. Toute petite, j’étais révoltée contre les injustices, les discriminations et les violences faites aux femmes. Je ressentais d’instinct qu’un autre monde était possible pour elles. Pour certaines, s’extraire de toute forme de domination est le projet de toute une vie.

Très tôt, la révolte s’est abattue sur moi comme une attaque de criquets sur un champ. A huit ans, j’étais déjà féministe sans savoir ce que signifiait ce mot. Je regardais, observais d’un œil perçant et sans complaisance la société malienne patriarcale, étrange syncrétisme d’islam et d’animisme qui, opprime les femmes et les musèle. Ma mère m’avait surnommée « Poudre de Piment »

J’ai eu une éducation entre un père qui brandissait la vertu et l’honneur en devise familiale, une mère conditionnée par les traditions dans une société où régnaient la solidarité, la générosité et la fraternité. Mais cette société était et est encore régie par les traditions, la loi islamique, les us et coutumes, l’obéissance à la norme et l’assignation à résidence identitaire sous l’œil omniprésent et impitoyable du tribunal communautaire.

Ma mère mit du zèle à faire de ses filles, de parfaites futures femmes. Après l’école, j’appris très jeune à aller au marché, à faire la cuisine pour une famille nombreuse, à habituer mes yeux à la fumée des feux de bois, à prendre les braises à mains nues pour les remettre dans l’âtre, à piler le mil, à lessiver à en avoir le dos endolori, à plumer les poulets, à balayer, à nettoyer, à récurer, à puiser l’eau du puits, à courir par ci, par là. J’étais tellement rapide et efficace que ma mère m’appelait autorail, Samantha Ma sorcière bien-aimée.

Très tôt, j’ai compris qu’un diplôme était un passeport pour la liberté. La solitude est un luxe en Afrique. Je me réfugiais dans les livres, je me mettais au lit à la même heure que les poules, pour rêver. Je me faisais la promesse de ne pas vivre la même vie que celle de nos mères. Toute petite, on apprend que la femme se doit, à l’instar du symbole des trois singes, ne rien voir, ne rien dire, ne rien entendre. Elle se doit d’être soumise aux règles édictées par les hommes et pour les hommes.

J’ai souvenance des chansons de mon enfance et des déclamations des griottes, qui telles des oies noires, célébraient le jour du mariage comme le plus beau jour qui était donné à vivre à une femme. Je garde l’image de la mariée, consentante ou non, voilée d’un tissu en coton blanc, pleurant comme une rivière pendant les crues. Je ne comprenais pas pourquoi le plus jour de la vie d’une femme était noyé dans les larmes, comme si le meilleur était derrière elle.

Aujourd’hui encore, dans les chansons des griottes, j’entends encore ânonner que le mariage est abnégation, sacrifice, soumission, souffrance, résignation. Que le destin de la femme est de souffrir. Que c’est par le biais de son mari qu’une femme peut entrer au paradis. Que le mariage et la naissance d’un fils sont les deux jours de gloire d’une femme. Qu’une femme peut donner naissance à un génie mais ne sera jamais elle-même un génie. Que pour ses enfants, la femme doit tout endurer encore et encore car ses sacrifices porteront chance à ses enfants. Un vrai lavage de cerveaux ! Aux filles démunies de bourses entre les jambes, les interdits, les enfermements, les injustices, les inégalités transmises de générations en générations par des mères qui n’ont connu que la douleur et l’abnégation et qui, telles certaines esclaves, ont intégré leurs chaînes comme normales et légitimes et ne veulent pas de la liberté, quand bien même elle leur était offerte.

Et ce n’est pas tout. Dans certaines ethnies, dès son jeune âge, toutes les précautions avaient déjà été prises pour calmer les ardeurs futures de la fillette. On procède aux sacrifices rituels. Une horde de femmes, transformées en bourreaux, exécutent le complot barbare criminellement ourdi. Tôt matin, on réveille la petite fille. Elle sait, l’intuition féminine est précoce, que quelque chose de pas religieux se trame. Son exécution est programmée et nul ne viendra interrompre le sacrifice rituel. Elles sont plus de 200 millions à subir cette torture. L’excision puisqu’il l’appeler par son nom. Un traitement inhumain dégradant, une atteinte fondamentale aux droits de l’homme. La forme la plus horrible du contrôle de la sexualité féminine. Ainsi coupées et cousues, elles seront des épouses soumises et des mères fécondes ; unique finalité de leur destin de femmes. C’est pour toutes les femmes du monde entier qu’il faut se battre. Car chaque femme opprimée rend possible l’oppression de l’autre.

Aujourd’hui, des centaines de milliers de femmes marcheront dans le monde. Pour tant de raisons. Mes pensées iront à cette jeune fille au village, portant un enfant dans le ventre, un sur le dos, un fardeau sur la tête. Pour qui la marche vers l’émancipation sera longue, très longue. Je veux qu’elle sache qu’il n’est pas possible que le destin de générations et de générations de femmes soit déterminé, qu’il y a une issue quelque part. Les mères opprimées ne sont pas destinées à mettre au monde des filles opprimées. On peut briser le cercle. Il n’y a pas de fatalité.

#8mars #égalité #JourneeInternationaleDesDroitsDesFemmes #Fatoumatasidibé #Bruxelles

Carte Blanche 17 273 femmes et filles sont déjà probablement excisées en Belgique.

10 Juillet 2018, Carte Blanche dans Le Vif/L’express : Excision, pour un contrôle externe des organes génitaux externes des filles à risque.
Opinion
10/07/18 à 08:10 – Mise à jour à 08:10 – Le Vif /L’Express.17 273 femmes et filles sont déjà probablement excisées en Belgique.
Voici venu le temps des vacances. Et aussi le temps des couteaux et des lames de rasoir. Imaginez une petite fille en vacances dans un pays. Imaginez-la maintenue par trois ou quatre femmes. Imaginez la petite fille terrorisée, se débattant, tentant de crier tandis qu’une main la bâillonne, tandis qu’on la mutile. Dans le meilleur des cas, ce sera dans un hôpital, dans le pire des cas dans une arrière-cour, une cuisine. A vif. Comme un animal qu’on sacrifie. Une torture, un traitement inhumain et dégradant. Un viol collectif.Mais ce n’est pas fini. Imaginez la petite fille souffrant le martyre durant des semaines de cicatrisation. Imaginez le traumatisme, les complications physiques, psychologiques tout au long de sa vie. Maintenant, imaginez que cette petite fille soit une tête blonde. Imaginez qu’elle soit votre fille, votre nièce, votre soeur, votre cousine, une amie, une connaissance. Comment réagiriez-vous face au discours de ceux qui refusent d’ouvrir un débat sur l’examen des organes génitaux externes des petites filles à risque d’excision ? Au motif que l’on risque de stigmatiser certaines communautés ? Car c’est bien la réponse qui revient inexorablement.
Je suis lasse. Je suis lasse de cet argument frileux, relativiste et cynique qui frise la non-assistance à personne en danger. Car oui, si cela se déroule loin de chez vous, cela peut arriver près de chez vous.
200 millions de femmes et filles dans le monde ont été mutilées, coupées, amputées, infibulées, sacrifiées sous l’autel du patriarcat . En Europe, 500000 femmes et filles ont subi une mutilation génitale. Environ 180 000 filles sont à risque chaque année. En Belgique, selon la dernière étude menée par le Groupe pour l’Abolition des Mutilations Sexuelles (GAMS), quelques 17 273 femmes et filles sont déjà probablement excisées et 8 644 sont intactes mais courent le risque de l’être, car originaires de pays où l’excision sont pratiquée. Des chiffres qui ont doublé en cinq ans, suite à l’arrivée de nouvelles populations en provenance de pays ou l’excision est pratiquée.
La demande existe. Et il est illusoire de croire que cette pratique, si ancrée dans les mentalités, puisse disparaitre aussi facilement en immigrant. L’horreur continue. Notamment lorsque les familles partent en voyage dans leur pays d’origine. A Londres, cliniques et médecins privés pratiqueraient également l’excision. Sur le territoire belge, des filles courent aussi le risque d’être mutilées. Sous couvert de correction vaginale, des médecins sur le territoire belge pratiqueraient l’excision sunnite consistant à l’ablation du capuchon du clitoris ; ce qui selon eux « n’est pas une clitoridectomie et ne viole donc pas la loi ». Ceci, donc par bienveillance et humanité, car « au motif de venir en aide aux personnes en détresse et leur faire éviter ainsi la pratique cruelle de la lame de rasoir, sur une table de cuisine ». Une information donnée dans un article de la revue médicale en ligne « MediQuality » en mars de cette année.
Moi qui suis originaire d’un pays, le Mali où plus de 85% des filles sont excisées, moi qui pensais que les lois de ce pays allaient protéger les petites filles de cette pratique barbare, je me rends compte qu’elles ne sont pas forcément à l’abri. Il n’y a pas d’excision minimaliste. Au nom du relativisme culturel, que je nomme « racisme à rebours », on renvoie des femmes à des traditions qui violent leurs droits les plus élémentaires. Pour preuve, il y a peu dans un article du Journal of Medical Ethics, deux gynécologues américains avaient émis l’idée horrible de rendre l’excision « minimaliste, afin de pallier le manque de sensibilité culturelle » de l’Occident et de respecter certaines obligations culturelles et religieuses sans mettre en danger la santé et le fonctionnement des organes génitaux des femmes ». Imagineriez-vous un seul instant que l’on tienne un tel discours si la petite fille était une tête blonde ? Poser la question, c’est y répondre.
Assez de relativisme, assez d’abandons. Il faut passer à la vitesse supérieure, renforcer la vigilance en matière de prévention et de protection des filles encourant des risques de mutilations génitales. Certes, il faut intensifier les formations des intervenants médicaux et sociaux, car il y a encore une méconnaissance du phénomène. Certes, il faut davantage soutenir financièrement et de manière pérenne les associations de terrain et notamment le GAMS qui mène un travail de prévention, de sensibilisation, de formation des professionnels, de prise en charge psychosociale, avec une équipe composée pour la plupart de bénévoles. Car les besoins sont réels et les moyens ne suivent pas.
Certes, il faut intensifier les campagnes de sensibilisation, d’information et de prévention à large échelle auprès des professionnels, des populations concernées et du grand public pour faire connaitre loi. Car si certaines personnes minimisent la portée de la loi, d’autres ignorent ou feignent d’ignorer que les MGF sont interdites en Belgique.
Mais surtout, je plaide depuis longtemps pour un renforcement de la prévention et de protection des filles encourant des risques de mutilations génitales par la mise en place d’un contrôle des organes génitaux externes des filles à risque.

Comme le recommande l’étude, il est temps d’organiser, en concertation avec les autres entités fédérées, une rencontre réunissant des experts nationaux et européens (en éthique, pédiatrie, médecine légale, droits de l’enfant, services de prévention de la petite enfance, médecine scolaire) en vue d’analyser la place de l’examen des organes génitaux externes dans la prévention et la protection des filles à risque et de décider, de manière concertée, la mise en place d’un mécanisme de prévention et d’identification des mutilations génitales via l’examen des organes génitaux externes des filles à risque. On ne peut plus décider de ne pas décider. Par peur de stigmatiser certaines communautés alors que fillettes issues de ces communautés courent le risque d’être mutilées ici ou ailleurs. Et ce dès le plus jeune âge.

Informer, sensibiliser, prévenir, ce n’est pas stigmatiser. L’excision est interdite en Belgique depuis 2001. L’article 409 du Code pénal sanctionne d’une peine d’emprisonnement de 3 à 5 ans quiconque aura favorisé toute forme de MGF d’une personne de sexe féminin, avec ou sans consentement de cette dernière. Un acte posé à l’étranger peut également être punissable une fois la personne de retour en Belgique. Pourtant, alors que des procès retentissants ont eu lieu en France notamment, ici en Belgique c’est le syndrome des trois singes « Je ne dis rien, je ne vois rien, je n’entends rien ». Très peu de plaintes ont été déposées, quasiment pas de dossier pénal ouvert par le Parquet, aucune poursuite judiciaire malgré des signalements d’enfants à risque d’excision, notamment au retour des vacances. Pendant ce temps, elle court la rumeur. Il n’y a pas de fumée sans feu. Il faut enquêter sérieusement sur les situations rapportées. Et mettre en place un mécanisme de contrôle des organes génitaux externes des filles à risque. Car on continue à trancher le sexe des filles.

 

Fatoumata Sidibé
Députée bruxelloise DéFI
Auteure et artiste peintre

Saran, 5 ans, devait passer quelques jours en Belgique.

14 juin 2018, Carte Blanche dans La Libre Saran, 5 ans, devait passer quelques jours en Belgique. Elle est considérée comme potentiellement dangereuse. 
Saran, 5 ans, devait passer quelques jours en Belgique. Elle est considérée comme potentiellement dangereuse.
Contribution externe Publié le – Mis à jour le
Une opinion de Fatoumata Sidibé, députée (Défi) au parlement bruxellois, auteure et artiste peintre.

Elle a 5 ans et se réjouissait de passer quelques jours chez sa tante en Belgique. Mais son visa a été refusé. Etrangère, elle est considérée comme potentiellement illégale, voire dangereuse. Je suis révoltée.
Elle s’appelle Saran. Elle a cinq ans. Elle se réjouissait de passer quelques jours de vacances chez sa tante en Belgique durant les congés scolaires de juillet/août. Sa tante voulait lui faire voir la mer du Nord, visiter les Ardennes, découvrir Pairi Daiza et Walibi, l’emmener à Eurodisney et visiter un château de la Loire. Elle voulait voir briller des étoiles dans ses yeux d’enfant. A la place des étoiles, ce sont des larmes qui ont perlé de ses yeux. Elle ne viendra pas en Belgique. Elle n’aura pas le visa. Ainsi en a décidé le consulat des Pays-Bas au Mali, l’autorité compétente qui représente la Belgique en matière de délivrance de visa court séjour Schengen.
Elle a cinq ans et elle n’est pas autorisée à venir en vacances en Belgique. Elle a cinq ans et est suspectée de vouloir rester illégalement en Belgique. Elle a cinq ans et est un ennemi à combattre. Elle a cinq ans et représente un danger pour la sécurité sociale, la cohésion sociale et la sécurité du pays. Elle est étrangère donc potentiellement menteuse, fraudeuse, délinquante. Elle a cinq ans et elle doit comprendre que l’Europe a besoin de frontières sûres et contrôlées. Elle a les larmes aux yeux car elle n’a pas « fourni suffisamment d’informations plausibles/vérifiables concernant l’objet de son séjour ». Le fait de venir en vacances chez sa tante est suspect.
La petite a les larmes aux yeux car on lui fait comprendre que sa tante est une menteuse. « Les informations communiquées pour justifier l’objet et les conditions du séjour envisagé ne sont pas fiables. L’authenticité des documents et des justificatifs fournis suscite des doutes, ainsi que la véracité de leur contenu. »

La tante, c’est moi !

 

Pour sa tante, la réponse négative a été un choc. D’abord l’incompréhension, puis la colère. Car la tante, c’est moi. La menteuse, c’est moi. En d’autres termes, je suis une fausse députée. Les documents officiels que j’ai fournis ne sont pas fiables. L’annexe 3bis – l’engagement de prise en charge – acceptée et signée par l’Office des étrangers est mise en doute.

La petite de cinq ans est coupable de ne pas « disposer dans son pays d’origine, d’un revenu régulier et substantiel lui permettant de subvenir à ses besoins par elle-même ». La petite de cinq ans est soupçonnée d’immigration illégale car sa « volonté de quitter le territoire des Etats membres avant l’expiration du visa n’a pas pu être établie ».

Sans doute est-il nécessaire de rappeler que je vis depuis plus de trente ans en Belgique et qu’aucun membre de ma famille, hormis pour d’exceptionnels courts séjours, pour motifs professionnels ou familiaux, n’a introduit une demande de séjour en Belgique. Si j’avais voulu jouer dans ce genre de pièce, il y a longtemps que j’aurais essayé de faire venir ma famille.

Je suis scandalisée, en colère

Je suis révoltée, scandalisée, écœurée. Non pas en mon nom mais au nom de tous ceux qui subissent l’humiliation, le mépris, l’arbitraire dans le cadre de leurs demandes de visas. Au nom de tous ceux que l’on déboute en bloc sans que ne soient prises en compte les situations particulières. Car, désormais, toute demande légale de visa est illégale. Toute demande d’immigration légale est illégale.

Je suis en colère au nom de tous ces citoyen-nes belges qui, bien que remplissant les conditions nécessaires, ne peuvent pas faire venir en vacances des membres de leurs familles. Je suis en colère et triste au nom de toutes ces personnes qui n’ont même pas pu obtenir le visa pour venir assister aux dernières heures de leur père, mère, enfant en Belgique. Je suis en colère au nom de tous ces artistes qui ne peuvent plus venir en tournée en Belgique. Je suis en colère au nom de tous ceux qui ne peuvent plus venir en Belgique pour motifs professionnels ou privés.

Les ambassades de Belgique à l’étranger ayant de moins en moins de section visa, on oblige des personnes à se rendre dans les pays limitrophes, parfois à des centaines de km de distance, pour introduire une demande de visa qui a toutes les chances d’être rejetée. Car les frontières légales sont fermées hermétiquement. Restent les voix illégales que beaucoup empruntent, au péril de leur vie, pour fuir la guerre, les conflits, les dictatures, les persécutions, le chômage, la faim, les violences de genre.

Je suis en colère au nom de ces étrangers « sans papiers » traqués, arrêtés dans la rue, chez eux, chez des amis, au boulot, dans les trains, métros, bus, trams, par ruse au domicile, à l’Office des étrangers, à la commune, à la police.

L’extrême droite infiltre la démocratie

Je suis en colère au nom de ceux qui sont arrêtés, menottés, emmenés pour détention administrative dans des centres fermés. Un univers véritablement carcéral, coûteux, inutile, stigmatisant avec des dispositifs de sécurité, une surveillance quasi constante, les règles de vie très strictes, le recours aux sanctions disciplinaires, l’isolement en cachot, l’accès très limité à l’air libre.

Je suis en colère au nom de ces « sans-papiers » présents sur le territoire belge, sans statut, sans droit, ne pouvant ni se former, ni travailler, ni se faire soigner. Je suis en colère au nom de ces personnes en possession d’un visa touristique en règle et d’un billet d’avion de retour, placées en centre fermé à leur arrivée en Belgique au motif qu’elles n’avaient pas de réservation hôtelière ou qu’elles méconnaîtraient les curiosités touristiques.

Je les ai rencontrés, ces hommes et ces femmes, dans les parcs, les rues, lors de mes visites dans les centres fermés. Un certain discours tend à déshumaniser l’étranger, à le présenter comme illégal, dangereux. Ce discours qui fait l’amalgame entre criminalité et immigration alimente le sentiment d’insécurité et renforce le discours nauséabond de l’extrême droite qui a infiltré notre démocratie, tel un cheval de Troie. J’ai honte à mon humanité. Mais pendant que certains construisent des murs, pendant que l’on criminalise la solidarité, des citoyens résistent face aux politiques répressives en violation des droits humains les plus fondamentaux. Cette mobilisation citoyenne donne à la solidarité, à l’humanité et à l’engagement, tout son sens.

Détention d’enfants en centre fermé

J’ai maintes fois clamé mon indignation face à la politique migratoire essentiellement axée sur la répression, des moyens policiers et administratifs disproportionnés, la privation de liberté, le non-respect de la dignité humaine, la violation des droits humains fondamentaux. L’Europe forteresse encourage l’immigration clandestine, la traite des êtres humains, l’esclavage, l’exploitation économique et sexuelle des migrants. Sans nier les problèmes, la réalité complexe de l’immigration demande des réponses complexes, justes, appropriées, démocratiques, humaines et respectueuses des droits humains. Déshumaniser l’autre, c’est conduire à la déshumanisation de la société.

Elle s’appelle Saran et pourrait se retrouver dans un centre fermé. Car oui, aussi ignoble, insupportable, odieux que cela puisse paraître, dès ce mois de juillet, un centre fermé pour migrants avec enfants mineurs à côté du centre 127bis à Steenokkerzeel sera ouvert. Alors que la Belgique avait mis fin à l’enfermement d’enfants mineurs dans les centres fermés, suite à la condamnation par la Cour européenne des droits de l’homme, le gouvernement fédéral a décidé de reprendre la détention d’enfants en centre fermé. Honteux et indigne pour nos démocraties. Ce qui se passe en Belgique doit nous faire réfléchir aux heures sombres du passé.

Quand la case du voisin brûle, il faut l’aider à l’éteindre car le feu pourrait contaminer ta case. Quand les droits des uns régressent, ceux des autres sont condamnés à l’être. Alors résistons, au nom de l’humanité, au nom de la démocratie.

IL EST TEMPS DE LEVER LE VOILE SUR LA LAÏCITE DE L’ETAT !

IL EST TEMPS DE LEVER LE VOILE SUR LA LAÏCITE DE L’ETAT !
Mon opinion dans le Soir du 17 décembre 2015.
 
La récente décision de justice, qui a donné raison à trois employées voilées chez Actiris est une alarme assourdissante. Le principe de neutralité de l’Etat a montré ses milites. Il est temps pour le législateur de prendre ses responsabilités et de légiférer sur l’interdiction du port des signes convictionnels ostentatoires par les agents assumant une mission dans les services publics.
Mon voile ne m’appartient pas !
Il y a dix ans, lorsque j’ai cofondé le comité belge Ni Putes Ni soumises, nous alertions déjà sur l’omerta qui régnait dans les quartiers, la mainmise du religieux sur les destins des filles, la montée des replis communautaires, de la radicalisation, l’instrumentalisation de la religion à des fins politiques. Nous alertions sur la prolifération de l’Islam des caves par des autoproclamés procurateurs de dieu, parfois téléguidés de l’étranger pour propager un Islam archaïque, obscurantiste, contraire à notre Etat de droit. Les fanatiques et la manne des pétrodollars ont trouvé un terreau fertile à la propagation de leur message. La prolifération du voile a été le signe visible de la transformation de la société et de son fractionnement. Qu’il soit porté par choix personnel, sentiment religieux, tradition, marquage identitaire ou par mode, il n’en demeure pas moins que ce voile est aujourd’hui sacralisé par des intégristes musulmans qui en ont fait un symbole politico-idéologique. On ne peut pas combattre l’extrémisme religieux tout en étant complaisant sur la question du voile dans la sphère de l’Etat.
Que celles qui disent que c’est leur choix pensent à toutes celles dont ce n’est pas le choix !
Je pense à ces femmes que je rencontre. Khadija porte le voile mais l’enlève en cachette. Jusqu’au jour où elle est prise en flagrant délit par son frère, gardien de l’honneur de la famille. Aminé est pharmacienne. Plusieurs personnes sont venues la mettre en garde ; « elle n’aurait pas de clients tant qu’elle ne porterait pas le voile ! ». Djemila a 10 ans. Sa mère la voile en dehors de l’école. Son argument : « quand elle sera grande, elle sera habituée et ne pourra plus s’en passer ». Rachida, elle s’est entendue dire dans une boucherie « Je ne sers pas les femmes impures ! ». Lasse d’être traitée de pute, Salimata a voulu porter plainte mais s’est entendu dire « Pourquoi vous ne le portez pas, ce voile, pour avoir la paix ?».
Pour de nombreuses citoyennes, le voile est devenu synonyme de pressions, de harcèlement, de régression de leur statut. Pour être respectée, il faut porter le voile.
Selon certains, c’est un outil d’émancipation qui permet d’avoir accès à la formation, à l’emploi, aux loisirs. Est-ce une liberté que d’accepter un enfermement pour en fuir un autre ? Il y a certes des discriminations en matière d’emploi et elles doivent être combattues mais arguer que l’interdiction menace l’accès des femmes au marché du travail, c’est faire preuve de mauvaise foi ! C’est l’injonction de porter le voile, donnée par un courant obscurantiste, qui est discriminante. Le port du voile participe aussi à une stratégie d’auto discrimination !
La sphère publique n’a pas à se soumettre à des prescrits religieux, déguisés sous couvert d’identité culturelle ! Un agent n’a pas à y afficher de manière ostentatoire ni ses convictions religieuses ni son athéisme. La foi est du domaine de la sphère privée. Chacun est libre ou non d’y manifester ses convictions. La citoyenneté, c’est aussi s’élever au-dessus de nos identités multiples pour définir ce qui nous est commun et nous rassemble.
Ne nous voilons pas la face, la majorité silencieuse des musulmans, premières victimes de l’intégrisme islamiste, savent que la loi civile doit passer avant les prescrits religieux, que la laïcité de l’Etat est le garant de leur liberté religieuse ! La montée de l’intégrisme islamiste et de l’extrême droite est nourrie par nos démissions collectives.
Fatoumata Sidibé
Députée bruxelloise DéFI
Auteure et artiste peintre
 

La force des hommes, c’est dire NON aux violences faites aux femmes !

La force des hommes, c’est dire NON aux violences faites aux femmes ! Carte blanche parue dans Le Soir, édition électronique du 25 novembre 2014.

Le mardi 25 novembre 2014 Bookmark and Share

Voici la carte blanche rédigée par la présidente des Femmes FDF pour la Journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes instaurée par les Nations Unies le 25 novembre.

« S’ils me tuent… Je sortirai mes bras de la tombe et je serai plus forte. »

Tel est le serment fait par Minerva, une des trois sœurs Mirabel, enlevées, torturées, violées et assassinées en République dominicaine sur les ordres du dictateur Trujillo, au pouvoir de 1930 à 1961. C’était le 25 novembre 1960. Jeunes militantes, elles incarnaient l’insoumission politique et sexuelle, la résistance contre la répression et la violence, le combat pour la liberté et la justice. C’est en hommage à leur combat que le 25 novembre a été proclamé « Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes » par l’Assemblée générale de l’ONU, le 17 décembre 1999.

Un problème mondial de santé publique
Le serment de Minerva symbolise le côté « revenant » des mouvements de libération, et, par conséquent, celui persistant des menaces et dominations. Les violences envers les femmes constituent, en effet, une des violations des droits de l’Homme les plus répandues dans tous les pays, quels que soient les groupes socio-économiques, religieux et culturels. C’est un problème de santé publique mondial.

Que ce soit en temps de guerre ou de paix, à la maison, au travail, à l’école, dans la rue, elles subissent les violences sous toutes ses formes : physiques, psychologiques, sexuelles et économiques exercées par le partenaire, sexuelles y compris celles liées au conflit, mariages forcés et précoces, mutilations génitales féminines, traite des personnes, crimes au nom de « l’honneur », meurtres de filles ou de femmes au simple motif qu’elles sont des femmes.

Selon l’OMS, au niveau mondial, 35% des femmes ont subi soit des violences de la part de leur partenaire intime, soit des violences sexuelles de la part d’une autre personne au cours de leur vie. En moyenne, 30% des femmes qui ont vécu en couple ont connu une forme quelconque de violence physique ou sexuelle de la part de leur partenaire. Au niveau mondial, jusqu’à 38% des meurtres de femmes sont perpétrés par un partenaire intime.

Face à ce tsunami de violences, les femmes ne se résignent pas. Car tout comme le soleil n’oublie jamais un village même s’il est petit, elles savent que le soleil de la liberté est pour tous les cieux. Elles se battent individuellement et collectivement. Elles espèrent un renfort massif pour mener ce combat à leurs côtés pour le respect de leurs droits à la liberté, à la dignité, à la sécurité, au respect, à l’intégrité physique, psychique et psychologique, à l’autodétermination sexuelle et reproductive, à l’égalité, à la vie.

La Belgique en panne de ratification
La Déclaration universelle des droits de l’Homme et de nombreux instruments juridiques internationaux ont pour ambition d’assurer le respect des droits fondamentaux des femmes et des filles, et de leur garantir leur droit à une vie exempte de violences. Mais les États manquent à leurs engagements et à leurs obligations de prévenir et d’éliminer toutes les formes de violence à l’égard des femmes et des filles. La Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (Convention d’Istanbul) est entrée en vigueur le 1er août 2014. A ce jour, seuls 15 Etats membres du Conseil de l’Europe l’ont ratifiée ! La Belgique ne l’a pas encore ratifiée ! Ce texte offre un cadre visant à assurer à la fois prévention, large protection des victimes et un mécanisme de poursuites des auteurs. La Convention met l’accent sur l’établissement de rapports et le contrôle de son application.

La ratification de cet instrument juridiquement contraignant, qui complète les instruments juridiques existants à travers le monde, sera un signal fort pour affirmer les droits fondamentaux inviolables des femmes et charrier des changements positifs.
Mais à côté des gouvernements, organisations non gouvernementales, parlements, pouvoirs locaux et associations, il faut que chacun prenne ses responsabilités.

Le moment est venu de créer une chaîne de résistance pour mettre fin à ce pénible hiver de discriminations et de violences, et apporter l’espoir d’un printemps de paix et de sécurité.

Engagez-vous !
Nous avons besoin davantage de voix masculines pour défendre cette cause. Nombre d’entre vous se lèvent déjà contre les violences infligées à l’autre moitié de l’humanité. Oui, vous êtes mus par un formidable militantisme. Vous avez compris que nos destinées sont liées, que les droits humains sont aussi les droits des femmes, que la liberté, la dignité et l’égalité n’ont pas de sexe.

Quelles que soient votre origine, votre appartenance culturelle, religieuse ou philosophique, je m’adresse à vous, père, frère, époux, compagnon, fils, jeune ou vieux. Je m’en viens vous dire que l’offensive que nous menons pour emporter les remparts de l’injustice doit être menée par une armée mixte.

Ensemble, nous pouvons stopper cette pandémie silencieuse qui ronge nos sociétés, détruit des destinées et des vies de génération en génération.
Votre mère, votre sœur, votre voisine, votre amie, votre fille, votre épouse, votre collègue n’en peuvent plus de crier et de n’entendre que l’écho de leurs souffrances. De près ou de loin, vous avez été ou serez un jour ou l’autre confrontés à ces violences commises par vos pairs. La honte doit changer de camp. Les femmes ne doivent pas porter seules le fardeau de la lutte contre les crimes commis contre elles par des hommes. C’est un lourd fardeau. Elles veulent le partager car un seul bras ne peut entourer un baobab. C’est fort de cette vérité que ONU Femmes a initié « HeForShe », une campagne de solidarité pour l’égalité des sexes.

Il est temps de se mobiliser pour affronter le patriarcat ; le système d’oppression historique qui érige la domination des hommes sur les femmes en principe d’organisation de la vie collective et individuelle.

Nous avons besoin de vous maintenant, mais aussi durant tout le temps que durera la lutte car nous ne serons pas satisfaites tant que les femmes continueront à être victimes d’indicibles horreurs. Nous ne devrons pas baisser notre vigilance car si nous avons obtenu de nombreuses avancées en termes de droits, d’autres sont à acquérir et d’autres sont menacés.

On ne nait pas femme, on le devient. On ne nait pas féministe, on le devient. Naître femme, ce n’est pas n’être qu’une femme. C’est être la moitié de l’humanité. C’est naître libre et être égale en droits.

Engagez-vous ! Faites passer le message chez vous, dans vos chaumières, vos lieux de vie, vos bureaux, quartiers. Dans les villes et les campagnes. Soyez les témoins actifs et responsables de votre temps. La force des hommes, c’est de dire non aux violences et discriminations faites aux femmes.

Il est temps de passer massivement à l’action…non violente. Vous pouvez être une arme de libération massive. Plutôt que d’aller à la guerre, allez à la paix ! Brandissez l’arme du respect mutuel ! Oui, vous pouvez faire la différence. Oui, un monde meilleur est possible. Avec l’engagement de tous et de chacun : homme, femme, garçon, fille, parent. Ensemble contre la haine ou le mépris des femmes, pour qu’elles puissent vivre libres et égales.

Ce n’est pas avec une baguette magique qu’on éliminera les violences à l’égard des femmes. Mais je crois au changement.
En travaillant sur la promotion du respect mutuel, sur les changements dans les mentalités et les comportements, la remise en cause des stéréotypes de genre et des discriminations, en misant sur l’éducation au respect et à l’égalité dès le plus jeune âge, il nous faudra moins d’une génération pour réaliser des progrès. Vos fils, petits-fils, fiers de votre engagement et de l’héritage que vous leur aurez légué, reprendront le flambeau et le transmettront à leur tour aux générations suivantes. Les petits garçons et les petites filles pourront grandir dans un monde de respect mutuel, de liberté, d’égalité, de paix. Et si nous rêvions ensemble ?

Fatoumata Sidibé
Députée bruxelloise
Auteure et artiste peintre

N.B. : La photo d’illustration de cet article est celle du bandeau de la page Facebook consacrée à la campagne  » La violence…je dis non ! Quand les hommes s’en mêlent… « , par laquelle les hommes sont invités à rejoindre le groupe et à poster une photo qui témoigne de leur engagement contre toutes les formes de violences à l’égard des femmes.

« Il y a plus inconnu que le soldat inconnu : sa femme. »

« Il y a plus inconnu que le soldat inconnu : sa femme. »

Le mercredi 12 novembre 2014 Bookmark and Share

Ce 11 novembre a marqué une double date. C’est ce qu’a tenu à rappeler Fatoumata Sidibé, présidente des Femmes FDF, députée bruxelloise…

D’abord la capitulation de l’Allemagne et la fin de la Première Guerre mondiale, le 11 novembre 1918. Une journée de recueillement, de devoir de mémoire. Une journée pour commémorer les morts pour la liberté. Des morts qui ne sont pas morts. Des morts dont le souvenir se dresse contre la barbarie, contre le fascisme, contre le nazisme. Des morts pour rappeler le devoir de transmettre aux nouvelles générations. Des morts pour saluer la résistance. Des morts pour rappeler la mémoire internationale d’un conflit qui a fait près de dix millions de morts et vingt millions de blessés. Une journée de célébration de la victoire pour les survivants qui ont cru, qui ont espéré que cette guerre resterait la dernière de l’Histoire, la « der des der »…

Le 11 novembre, c’est aussi l’hommage au soldat inconnu.
Tout un symbole. Celui des soldats tombés au combat durant la 1re guerre mondiale, des soldats tués durant la deuxième guerre, celui de tous les soldats fauchés durant les actions militaires de maintien de la paix à travers le monde.

Un jour pour rappeler que les « tirailleurs sénégalais » (d’Afrique noire et du Maghreb) et créoles (Guadeloupe, Guyane, Martinique et Réunion) ont marqué de leur sang l’histoire de la deuxième guerre mondiale. Et qu’ils ont peu ou pas eu la reconnaissance de leurs pairs et de l’Histoire.

Une journée pour rappeler, plus que jamais en cette période trouble de montée des intégrismes, des extrêmes de toutes étiologies, que les morts portent le flambeau de la vigilance.

Ce 11 novembre, c’est aussi la Journée nationale de la Femme en Belgique ; une date choisie d’après le passage de Simone de Beauvoir à Bruxelles, le 11 novembre 1972.
Le féminisme n’est pas mort. Il renaît, tel un phœnix car il s’agit aujourd’hui de préserver les droits acquis par les féministes historiques et d’en gagner d’autres.

Ce 11 novembre, c’est aussi l’occasion de rappeler, dans ce travail de devoir de mémoire, que durant les guerres, les femmes ont assumé tous les rôles, dans les villes, les campagnes, dans les foyers, sur le front : infirmières, militaires, espionnes, munitionettes, ambulancières, résistantes, agents, gardiennes de camps, mères de famille, pères de famille, chefs d’équipe dans les chemins de fer, menuisières, laboureurs, messagères d’espoir.

Oui, elles ont dû se battre simultanément sur deux fronts : contre l’ennemi de la patrie et contre la machine de l’État qui exerça une surveillance et un contrôle accru sur le corps féminin. Elles ont été sur tous les fronts, là où on leur déniait une capacité. La guerre finie, elles s’en sont souvenues. Elles sont, pour la plupart, tombées dans l’invisibilité, mais elles ont posé les premières pierres de l’émancipation féminine.

Ce 11 novembre, c’est aussi l’occasion de rendre hommage à ces oubliées et de rappeler un slogan qui a marqué l’émergence du Mouvement de libération de la femme en France en 1970 : « Il y a plus inconnu que le soldat inconnu : sa femme ».

Fatoumata Sidibé
Présidente des Femmes FDF
Députée bruxelloise
Auteure et artiste peintre

Discrimination, j’écris ton nom…

Souvenez-vous, l’été dernier… quand j’ai voulu picoter dans les caves !

Pour celles et ceux qui n’ont pas suivi, je vous suggère de lire ma chronique d’une plainte déposée…pour discrimination. Les articles sont à lire ici dans Le Soir et la DH.

La gérante de l’établissement « Les Caves du Picotin » m’avait refusé l’entrée, au motif que je ressemblais à la description d’une femme qui commettait des faits de grivèlerie dans le quartier. Je savais que ma plainte déposée à la police serait classée sans suite, faute de preuve suffisantes mais c’était important de parler. Parallèlement au dépôt de plainte, j’ai fait un signalement au Centre pour l’Egalité des Chances et la Lutte contre le racisme afin de recueillir leur avis au regard de la loi. Lors d’un entretien téléphonique en septembre 2013 avec le service discrimination du Centre, j’avais été étonnée d’apprendre que la tenancière s’était rétractée et avait annoncé que ce n’est pas la police qui l’avait mise en garde mais des restaurateurs. Par ailleurs, le CECLR disait avait contacté la police d’Ixelles qui leur a indiqué qu’elle n’a pas enregistré de plaintes pour grivèlerie à l’encontre d’une personne correspondant au profil annoncé : « une femme de type mulâtre, trentenaire, de bonne présentation »! De mon côté, j’ai fait effectuer des recherches auprès de la commune d’Ixelles. Il m’a été confirmé que la police n’a jamais fait de signalement d’une mulâtre. Or, toute l’argumentation de la restauratrice reposait sur la mise en garde et le signalement reçu par la police. A la lumière des faits et des éléments, j’ai redemandé l’avis et la décision du Centre concernant cette affaire en février. Il me semblait important de clarifier le cadre et les limites à la liberté d’interdire l’accès à un lieu public sur base d’allégations fondées sur des caractéristiques ethnique, culturelles, physiques ou autre. Le centre a répondu, entre autres, que « l’absence de plainte ne suffit pas à démontrer de manière absolue que cet établissement n’a pas eu à faire face à des faits. Ils n’ont pas nécessairement fait l’objet d’une démarche auprès des services de police » Donc, une dizaine de cas de grivèlerie se déroulent dans différents restaurants à Ixelles et aucun des restaurateurs ne juge important de le signaler à la police ? Vous avez dit bizarre ? Comme c’est étrange ! Et le Centre pour l’Egalité des Chances et la Lutte contre le Racisme de poursuivre : « Sur un seul signalement et compte tenu des explications qui nous ont été données, le Centre ne peut conclure au caractère discriminatoire, au sens de la loi, du refus de service qui vous a opposé. On peut comprendre que, n’ayant strictement rien à vous reprocher, vous vous sentez particulièrement blessée par ce refus » Moi blessée ? Allons donc ? Il n’y a pas de quoi, vraiment ! Et le Centre de clôturer « A ce titre, vous pourriez demander une forme de compensation, si vous estimez que les excuses ne suffisent pas, non pas tant en raison d’une attitude éventuellement raciste, mais bien en raison du manque de discernement et une communication indélicate de la part de l’établissement. Le Centre considère donc qu’une procédure judiciaire ne serait pas opportune eu égard aux éléments des faits repris ci-dessus et aux excuses formulées par la gérante. Le Centre conserve donc un enregistrement de ce dossier et pourrait en cas de nouveau signalement envers ce restaurant, envisager de novelles démarches. Si des incidents similaires devaient se répéter, ce serait un indice qui pourrait penser à une politique d’accès discriminatoire ». Voilà l’affaire est close mais pas le silence. Brisez-le chaque fois que vous ou quelqu’un de votre entourage est victime de discriminations qu’elles soient liées à l’âge, à l’origine ethnique, à l’appartenance religieuse, à l’orientation sexuelle, au handicap, au sexe. Au nom de toutes celles et ceux qui subissent les discriminations… dans le silence. Il y aura forcément le CAS de trop qui ne résistera pas à l’épreuve de la loi!

Un fonctionnaire est-il un panneau d’affichage religieux ?

Carte blanche parue dans le soir de ce mercredi. Le lien est accessible ici. Un fonctionnaire est-il un panneau d’affichage religieux ?

Grosse ambiance, il y a quelques jours au Parlement bruxellois. J’y soutenais l’idée que les signes convictionnels  n’ont rien à faire dans la fonction publique bruxelloise : un fonctionnaire n’est pas un panneau publicitaire religieux : il est payé par tous les citoyens, il doit servir tous les citoyens sans afficher ses opinions et sa philosophie. Ni voile, ni croix, ni kippa, ni couteau sikh, ni flambeau laïque, ni slogan ou photo d’un parti ou d’une personnalité politique. Un fonctionnaire se doit d’être neutre ! Read More

Un fonctionnaire est-il un panneau d’affichage religieux ?

Un fonctionnaire est-il un panneau d’affichage religieux ? Ma carte blanche parue dans le soir de ce mercredi 8 janvier 2014.
http://www.lesoir.be/397171/article/debats/cartes-blanches/2014-01-08/un-fonctionnaire-est-il-un-panneau-d-affichage-religieux.

Grosse ambiance, il y a quelques jours au Parlement bruxellois. J’y soutenais l’idée que les signes convictionnels  n’ont rien à faire dans la fonction publique bruxelloise : un fonctionnaire n’est pas un panneau publicitaire religieux : il est payé par tous les citoyens, il doit servir tous les citoyens sans afficher ses opinions et sa philosophie. Ni voile, ni croix, ni kippa, ni couteau sikh, ni flambeau laïque, ni slogan ou photo d’un parti ou d’une personnalité politique. Un fonctionnaire se doit d’être neutre ! A l’occasion de ce débat, qu’ai-je à nouveau constaté (hormis la très mauvaise humeur et l’agressivité de quelques-uns ?). Ce fait consternant : beaucoup de nos responsables politiques sont atteints du syndrome des trois singes : « Je ne dis rien, je n’entends rien, je ne vois rien ». Surtout, ne parlons pas de ce qui fâche… Et pourtant, l’absence de règles précises concernant l’interdiction ou non du port des signes convictionnels à l’école, dans la fonction publique fédérale, régionale, communale et intercommunale mène à des décisions disparates, contestations, recours en justice. Il est temps de se montrer clair et courageux : empêcher l’intrusion du religieux dans les services publics, c’est permettre de sortir de la logique de l’exclusion, de l’affrontement, du fractionnement, des identités concurrentes. C’est définir un espace de paix respectueux de chacune et de chacun.   Oui, il est temps de légiférer ! Read More

Chronique d’une plainte déposée… pour discrimination.

Ma chronique d’une plainte déposée… pour  discrimination.
Discrimination, j’écris ton nom.

– Incident racial dans un resto
– « On m’a refusé l’entrée ».  IXELLES, Aux Caves du Picotin, on craignait une tentative de grivèlerie
– La députée black virée du resto comme une voleuse

Ainsi étaient titrés les articles parus dans la presse le 9 août 2013.  C’est un peu court, Mesdames, Messieurs. Je vous expose ma chronique d’une plainte déposée.
Rappel des faits.
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