Bruxelles : vers moins de discriminations à l’entrée des dancings.

| L’ACTU DE BRUXELLES | Publié le 7/08/2017 à 18:50 –   Dans le Nord Eclair

Bruxelles : vers moins de discriminations à l’entrée des dancings. 

La députée bruxelloise Fatoumata Sidibé (Défi) porte ce projet depuis près de 5 ans. Une nouvelle étape a été franchie : une proposition de résolution contre les discriminations à l’entrée des boîtes de nuits vient d’être votée en commission. Un certain nombre de mesures sont désormais sur la table pour lutter contre ce phénomène.

Nombreux sont ceux qui se sont déjà fait refouler à l’entrée d’une boîte de nuit : vêtements inadéquats, établissements pleins… Les raisons peuvent être multiples. Mais pour Fatoumata Sidibé qui étudie la situation depuis de nombreuses années, le problème est bien souvent une histoire de race, de couleur de peau ou d’accent. « Beaucoup de jeunes sont victimes de discrimination à l’entrée des discothèques, souvent parce qu’ils sont noirs ou arabes. La plupart du temps, ils ne protestent pas. Ils essayent juste d’aller ailleurs ». La députée connaît bien le problème : elle a déjà vécu ce genre de situation. En 2013, elle s’était vue refuser l’accès à un restaurant, sous prétexte qu’une femme mulâtre sévissait dans le quartier en repartant sans payer sa note. La députée avait alors saisi la presse.

« Quand j’ai voulu porter plainte, les policiers m’ont demandé plusieurs fois si je voulais vraiment le faire, si ça en valait la peine. C’est bien la preuve que ces actes ne sont pas vraiment pris au sérieux ». Sa voix a finalement été entendue : une proposition de résolution contre les discriminations à l’entrée des night-clubs et des lieux de sortie vient d’être votée en commission. « Un travail de prévention et d’information est nécessaire. Il faut que ces personnes connaissent leurs droits si elles pensent être victimes de discriminations », explique la députée. « Il peut s’agir d’un numéro de téléphone où l’on peut envoyer un SMS en cas de refus jugé abusif. Ce procédé existe déjà Gand ».

Parmi les autres idées évoquées : l’installation de caméras de surveillance permettant de repérer les établissements où les refus potentiellement discriminatoires sont les plus fréquents ou encore l’affichage clair des conditions d’accès à l’établissement en ce qui concerne notamment la tenue vestimentaire. « Dans le futur, on pourrait même aller plus loin et instaurer une sorte de label diversité. Les établissements souhaitant lutter contre la discrimination pourraient en faire partie ».

Pour Fatoumata Sidibé, un grand pas a été fait avec le renversement de la charge de la preuve : « ce n’est plus au client de prouver pourquoi il pense être victime. C’est à l’établissement de prouver qu’il n’a pas fait preuve de discrimination ». La députée a toutefois un grand regret. « Même si la plainte aboutie, c’est le portier qui est mis en cause et non pas le gérant de la boîte de nuit ».

Faire confiance aux portiers.
La fédération Horeca qui représente le secteur à Bruxelles, n’est pas du même avis. Pour Yvan Roque, son président, il faut avant tout laisser les portiers faire leur travail : « moi aussi on m’a déjà refusé l’accès à des établissements quand j’étais jeune. Il y a parfois des erreurs mais la plupart du temps, les videurs savent ce qu’ils font. S’ils refusent l’entrée à certaines personnes, c’est avant tout pour protéger les personnes qui sont déjà à l’intérieur. Ce n’est pas de la discrimination ». Le projet a donc été voté en commission, c’est maintenant aux députés du parlement bruxellois d’en débattre.

« Prendre exemple sur Gand et Louvain »
Unia, le Centre interfédéral pour l’égalité des chances, accueille très favorablement cette proposition de résolution. Même si pour son président, Patrick Charlier, il y a encore du chemin à parcourir. « À Bruxelles, il manque une ordonnance anti-discrimination transversale : il n’y a pas de disposition qui interdit la discrimination dans le domaine des biens et des services, contrairement au fédéral ou dans les autres communautés régions. Gand et Louvain sont même en avance sur la capitale belge ». Patrick Charlier fait référence à plusieurs mesures prises dans ces deux villes. « Là-bas, les portiers sont tenus de remplir un registre de refus. Ils doivent réellement justifier pourquoi ils refusent l’accès à certaines personnes ». À Gand, tous ceux qui se sentent victimes de discrimination à l’entrée d’un établissement peuvent aussi envoyer un SMS qui est ensuite transféré vers Unia. À ce sujet, le président du centre est un peu plus sceptique : « il y a très peu de personnes qui utilisent ce numéro et c’est difficile de traiter chaque plainte individuellement ». Patrick Charlier pense qu’un système plus global comme celui mis en place à Rotterdam aux Pays-Bas, serait plus intéressant. « À l’entrée de presque tous les lieux de sortie, il y a un code QR, une sorte de code-barres. Les personnes se sentant victimes de discrimination n’ont qu’à le scanner. Cela permet de repérer les établissements où il y a le plus de plaintes et de pouvoir entamer des discussions avec leurs gérants ». Pour le directeur d’Unia, le meilleur moyen de lutter contre ce phénomène serait de pouvoir discuter directement avec le secteur Horeca.

 

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